J’attendais qu’Enzo commence à me parler. Ce qu’il ne fit pas. Le temps que je préparais ma soupe, il était resté distant, comme sur la réserve, luttant intérieurement afin de savoir s’il me dirait enfin ce qu’il est et ce qu’il fait.
Comme il ne disait rien, je me décidai à m’assoir sur la chaise qui lui faisait face, et entamai mon bol fumant. Je le fixai, et approchai ma cuillère de mes lèvres. En un instant, ces lèvres ne m’appartenaient plus. Si je portai ce bout de métal à celles-ci, la trace du dernier baiser échangé disparaitrait alors. J’hésitai, regardant tour à tour le contenu de ma main et les lèvres exquises et
désirables de celui qui m’observait. Mon estomac remporta la bataille, tandis que je souhaitais secrètement que le baiser que je revivais ne serait pas le dernier que je recevrais.
Je soufflais distraitement sur la soupe avant de la mettre dans ma bouche, espérant toujours qu’Enzo commence son récit puis me décidai à lui adresser la parole.
-C’est parce que ce que je mange te répugne que tu ne veux pas t’approcher ? Je baissai la tête. Je ne t’oblige pas à rester Enzo… Je me doute que ça ne doit pas être évident. Ma curiosité doit t’étonner, ou t’effrayer ; mais je te promets de ne pas porter de jugement. Quoi que tu me dises, je…
J’avalai une nouvelle cuillère de soupe pour m’empêcher de promettre une chose que je n’étais
pas certaine d’être capable de respecter, fouillant dans son regard de plus en plus couleur or. Comme s’ils changeaient de couleur. A croire que ses pupilles se désintégraient. Je me redressai afin d’examiner ce phénomène, et plissai les yeux.
-Tes yeux… C’est bizarre… Tu portes des lentilles ? J’aurais juré qu’ils étaient bleu gris ce soir. Ou alors est ce l’éclairage ? Cet or…
Sans m’en apercevoir, je m’étais levée et avancé jusqu’à me retrouver face à ces deux bijoux, tentant d’y trouver la vérité.